Le lac de Sarrans, retenue artificielle emblématique de la Truyère, doit sa naissance au barrage du même nom. La construction de cet ouvrage d’envergure débuta en 1929 sous la direction de la société Alsthom et des ingénieurs d’EDF, dans un contexte de développement industriel et de transition énergétique pour la France.
Le barrage de Sarrans fut achevé et mis en service dès 1934. À l’époque, il était l’un des plus hauts barrages d’Europe, culminant à 105 mètres. La retenue d’eau créa un lac de 35 kilomètres de long, modifiant profondément la géographie locale. Avec une capacité de stockage de près de 300 millions de mètres cubes d’eau, cet ouvrage est vite devenu central dans l’activité hydroélectrique française.
Le barrage de Sarrans fait partie d’un aménagement global de la rivière Truyère, conçu pour produire de l’hydroélectricité. La mise en place des barrages sur cette rivière, jalonnée par Bort-les-Orgues, Grandval, Lanau et Sarrans, répondait à un objectif clair : électrifier la France rurale et dynamiser son industrie après la Première Guerre mondiale.
Chaque étape de cet aménagement traduisit des avancées techniques majeures. La construction de Sarrans, en particulier, utilisa des coffrages innovants et profita de la mobilisation de centaines d’ouvriers venus de toute la région. Aujourd’hui encore, il alimente une centrale hydroélectrique d’une puissance installée de 190 MW. Une contribution essentielle au mix énergétique français.
La création du lac de Sarrans, avec l’immersion des terres en 1934, a marqué un tournant dans l’histoire locale. Certains villages, notamment l’ancien village de Sarrans, furent submergés par les eaux. Les habitants durent abandonner leurs maisons, leurs champs et leurs forêts. Une mémoire empreinte de nostalgie persiste chez les descendants de ces familles déplacées, qui racontent avec émotion ce que fut l’exode forcé de ces terres.
Si la naissance du lac a représenté une perte pour certains, elle a aussi offert une opportunité économique aux communes environnantes. Les villages situés en hauteur, comme Sainte-Geneviève-sur-Argence ou Pierrefort, se sont adaptés et bénéficient aujourd’hui d’une activité touristique florissante liée au lac.
Le lac de Sarrans s’inscrit dans un paysage spectaculaire, modelé par le relief volcanique de l’Auvergne. Il serpente à travers des vallées encaissées, où les pentes abruptes se mêlent à de vastes plateaux verdoyants, trace typique des gorges de la Truyère. À mesure qu'on parcourt ses rives, on découvre des panoramas inattendus, entre préalpins et montagnards.
Ces reliefs préservés laissent place à de vastes forêts feuillues, entrecoupées de pâturages où paissent encore les troupeaux d’Aubrac. Le lac est également ceinturé de formations rocheuses particulières : des schistes sombres et des basaltes, rappelant l’histoire géologique volcanique du Massif central.
Le bassin de la Truyère est un système hydrologique complexe qui prend sa source dans le sud de l’Aubrac, pour se jeter dans le Lot après un parcours sinueux. Le lac de Sarrans se situe précisément au cœur de ce bassin, où il joue un rôle central dans la gestion de l’eau.
Sous la surface du lac repose une mosaïque de sols riches en sédiments, anciens témoins du passage cyclique des crues et de la sedimentation naturelle. Ce réservoir alimente non seulement l’énergie hydraulique, mais participe aussi à la régulation des eaux, empêchant les inondations en aval.
Dès ses premiers jours, le barrage de Sarrans a marqué l’histoire de l’hydroélectricité en France. En 1934, l’idée même d’un barrage capable de générer autant d’énergie renouvelable semblait futuriste. Ces infrastructures ont permis l’essor des campagnes rurales tout en renforçant les ambitions françaises pour une énergie propre et durable.
Encore aujourd’hui, Sarrans figure parmi les ouvrages stratégiques d’EDF pour répondre aux besoins en électricité verte. L’association entre tradition et modernité fait de ce barrage un symbole de l’ingéniosité humaine, tout en préservant l’environnement.
Le lac de Sarrans n’est pas seulement une retenue d’eau, mais un espace qui incarne l’identité géographique de tout un territoire. Les villages environnants, les éleveurs de l’Aubrac et les randonneurs qui sillonnent les rives partagent un attachement viscéral à ces paysages changeants au fil des saisons.
Ici, la vie est modelée par la nature : des hivers parfois rudes où le lac s’enrobe de brume, aux étés où les eaux calmes reflètent les ciels d’Auvergne. Cette authenticité contribue à renforcer l’attractivité du lac, non seulement comme destination touristique, mais aussi comme source inépuisable d’inspiration pour les habitants locaux.
Le territoire autour du lac révèle une étonnante diversité de sols et de formations naturelles. On y trouve tout à la fois des prairies fertiles (idéales pour l’élevage), des landes d’altitude où dominent les genêts et les bruyères, des forêts denses de chênes et de hêtres, ainsi que des zones rocheuses à la végétation clairsemée.
Cette composition géologique unique est un rêve pour les passionnés d’écologie. Sarrans accueille une biodiversité riche, avec des espèces emblématiques comme les loutres d’eau douce, les milans royaux et un chapelet de poissons diversifiés qui peuplent le lac.
Le lac de Sarrans est bien plus qu’un simple plan d’eau dans les montagnes d’Auvergne. Il est un témoin vivant des transformations industrielles du XXe siècle, de l’adaptation humaine au fil du temps, et du lien profond qu’entretiennent les habitants avec leur territoire.
Que ce soit pour découvrir son histoire héroïque, randonner sur ses berges ou simplement contempler les couchers de soleil qui se reflètent dans ses eaux calmes, le lac de Sarrans invite chaque visiteur à explorer un coin d’Auvergne préservé où authenticité et modernité se rencontrent harmonieuse.